Déclaration du Conseil franco-allemand de défense et de sécurité (26 octobre 2004)

I

La France et l’Allemagne se félicitent des progrès substantiels réalisés par l’Union européenne au cours des derniers mois dans le domaine de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD). L’accord sur le traité constitutionnel, en juin 2004, a permis de franchir une étape décisive. La France et l’Allemagne y ont apporté une contribution essentielle, notamment par leurs propositions communes dès la Convention. Nos deux pays entendent contribuer à faire de l’Union européenne un acteur à part entière sur la scène internationale.

II

La France et l’Allemagne continueront à œuvrer dans les prochains mois pour faire progresser la PESD. Nous attachons beaucoup d’importance à la mise en œuvre des instruments prévus par la constitution et par les décisions pertinentes.

La France et l’Allemagne saluent l’adoption, en juin 2004, du concept de groupements tactiques de l’UE ("battle groups"). Ces groupements tactiques renforceront la capacité militaire de réaction aux crises de l’Union européenne. La France et l’Allemagne ont exprimé leur volonté d’apporter, dès la phase de réalisation (2005-2006) des contributions substantielles destinées, dans le cadre du concept, à la capacité de réaction rapide de l’Union européenne. Par ailleurs, elles ont annoncé la mise en place d’un groupement tactique commun à partir de la Brigade franco-allemande. Ce groupement tactique sera ouvert à d’autres contributions, émanant notamment des nations cadres du Corps européen. Les planifications en vue de sa mise en œuvre ont dores et déjà été lancée. Nos deux pays soulignent que le concept de groupements tactiques et la Force de réaction rapide (NRF) de l’OTAN sont complémentaires et se renforcent mutuellement.

La Stratégie européenne de sécurité et le concept d’opérations rapides de gestion des crises constituent le cadre conceptuel du processus capacitaire (objectif global 2010). La France et l’Allemagne rappellent que la conférence d’engagement des capacités militaires de novembre est une étape importante de ce processus.

La France et l’Allemagne jouent un rôle important de catalyseur pour le développement des capacités européennes dans la réaction rapide aux crises. Elles continueront donc avec détermination à développer la Brigade franco-allemande pour en faire le noyau d’une "force dentrée initiale" pour l’Union européenne et l’OTAN, principalement dans le cadre du Corps européen. Par ailleurs, nos deux pays élaborent une vision commune du développement de la Brigade franco-allemande dans les années à venir.

Le renforcement des capacités de planification et de commandement améliorera encore la capacité d’action de l’UE. Aussi l’Allemagne et la France se félicitent-elles des progrès accomplis dans la mise en œuvre du document "Défense européenne : consultations OTAN/UE, planifications et opérations" de décembre 2003. Elles estiment que les travaux de mise en place d’un centre d’opérations doivent avancer rapidement afin que les moyens nécessaires à un tel centre soient disponibles le 1er janvier 2006 au plus tard. En outre, nos deux pays estiment que les travaux nécessaires à la mise en place d’une cellule civile-militaire au sein de l’État-major militaire de l’UE (EMUE) ainsi que d’une petite cellule de l’UE au SHAPE et d’arrangements de liaison de l’OTAN avec l’EMUE seront terminés d’ici à la fin 2004.

La France et l’Allemagne se félicitent de la mise en place de l’Agence européenne de défense, placée sous l’autorité du Conseil. Nos deux pays sont convaincus que l’Agence rendra les efforts de défense des pays partenaires plus cohérents et plus efficaces. L’Agence est appelée à devenir un instrument performant en vue d’une politique européenne de l’armement ambitieuse et efficace au service de la PESD. La France et l’Allemagne poursuivront leur coopération étroite dans le cadre du Conseil et de l’Agence. Dans ce contexte, un rôle particulier incombe aux ministres de la Défense. Ceux-ci assument aussi ce rôle dans le cadre de leurs responsabilités, au sein du Conseil Affaires générales et Relations extérieures, en matière de capacités militaires et de questions concernant l’Agence.

III

La France et l’Allemagne se félicitent du succès avec lequel les capacités de gestion civile des crises de l’Union européenne ont été développées. Aux actuelles missions de police en Bosnie-Herzégovine et en Macédoine est venue s’ajouter une mission "État de droit" de l’Union européenne en Géorgie, intitulée "THEMIS" et à laquelle la France et l’Allemagne participent activement.

La conférence sur les capacités civiles qui réunira les ministres au mois de novembre et l’élaboration d’un objectif global civil consolidé doivent donner de nouvelles impulsions à la gestion civile des crises. Cet objectif global définira des paramètres stratégiques pour la gestion civile des crises et marquera le début d’un développement plus systématique des capacités civiles. L’objectif global civil constituera ainsi, à côté de l’objectif global 2010 pour les capacités militaires, une étape importante en vue de rendre opérationnelle la stratégie européenne de sécurité dans le domaine de la PESD.

IV

L’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique sont des partenaires qui partagent les mêmes valeurs et, idéaux et intérêts. Fidèles aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, ils doivent continuer à faire face ensemble aux menaces qui pèsent sur la sécurité et la paix mondiale.

La mise en œuvre des arrangements en Bosnie-Herzégovine donne une expression concrète au partenariat stratégique qui existe entre l’Union européenne et l’OTAN dans le cadre de la gestion des crises sur la base des déclarations des sommets de Berlin et Washington.

Nous demeurons convaincus que le développement de la PESD contribue à renforcer le pilier européen de l’Alliance, qui demeure le fondement de notre défense collective.

V

Dans le cadre d’une politique globale de l’Union européenne à l’égard de la Bosnie-Herzégovine, la France et l’Allemagne contribuent, ensemble avec leurs partenaires, à la stabilisation du pays. L’a France et l’Allemagne enregistrent avec satisfaction que les travaux de préparation de l’opération "Althea", qui est destinée à prendre la relève de l’opération SFOR et sera menée par l’UE en ayant recours aux moyens et capacités de l’OTAN, sont en bonne voie. "Althea" constituera un nouveau cas d’application important pour les arrangements dits "Berlin Plus" entre l’UE et l’OTAN.
En août 2004, le Corps européen, auquel sont pleinement associés les deux pays, a pris le commandement de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en Afghanistan. L’état-major de la Brigade franco-allemande assume le commandement de la brigade multinationale à Kaboul. La France a également des effectifs au sein de l’équipe régionale allemande de reconstruction de province à Koundouz ainsi que de l’antenne de l’ambassade d’Allemagne à Herat. L’Allemagne a mis sur pied en septembre 2004 une deuxième équipe régionale de reconstruction à Faisabad. Nos deux pays ont élargi leur engagement sur le plan du soutien électoral. Ils apportent ainsi une contribution précieuse à la stabilisation du pays.

Depuis le mois de septembre, la France assume le commandement de l’opération de l’OTAN au Kosovo (KFOR), l’Allemagne demeurant le principal contributeur à l’opération. Les événements du printemps 2004 ont montré que le maintien d’une présence militaire efficace sur place est nécessaire si l’on veut éviter de nouveaux affrontements ethniques. Le contexte régional demeurant difficile, nous en appelons à nos alliés pour qu’ils maintiennent leur engagement au sein de la KFOR.

VI

L’Allemagne et la France encouragent activement la formation d’une culture européenne de sécurité et de défense. Nos deux pays se félicitent de ce que le cours pilote du Collège européen de sécurité et de défense qui réunit les participants des 25 pays membres de l’UE, ait démarré avec succès à Berlin et se poursuive à Paris au début du mois de novembre.

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